L’infini des possibles
L'infini des possibles
Dans cet univers où tout est organisé, délimité, légalisé, je cherche une oasis de liberté. Une place ou personne ne viendrait me dire : "c'est à moi, c'est chez moi, c'est privé..." un endroit où je pourrais me poser un moment, respirer l'air du temps avant de repartir un peu plus loin.
Le voyage est-il une fuite? Peut-être, ...est-il un renoncement? Sans doute, est-il le moyen de vivre par delà les contraintes? Sûrement. Mais n'ai-je donc pas ce droit de ne pas vouloir m'enfermer dans un univers où les gens se sont volontairement emprisonnés ?
Ce goût de la liberté je l'ai en moi depuis toujours' il m'habite intensément depuis longtemps, et ils grandit encore. Jamais je ne me suis sentie liée par aucune loi, sauf pour ma sécurité et ma tranquillité, car il faut souvent plier pour éviter les conflits inutiles et les problèmes ...mais on ne peut pas dire que je suis une citoyenne modèle, ni que je respecte les échéances imposées...cela m'est difficile et quand je dois respecter quelque chose impérativement, c'est sur le fil, en dernier recours, contrainte et forcée.
Tout le reste le champ même de ma vie et de mes décision, c'est "libre service" et j'avoue que l'avis et et sentiments des autres ne rentrent jamais en ligne de compte...je sais cela paraît dur, insensible...alors que c'est tout l'inverse. Tout personne en ma présence peut se sentir libre d'exprimer son ressenti, je l'accueille, je l'accepte, je ne cherche plus à comprendre et surtout je n'y confère aucun jugement. Je suis seulement curieuse des attitudes des autres à mon égard. Par contre chacun de mes actes est délivré de l'influence des autres.
J'attache une grande importance à la Vie, sous toutes ses formes. Ce qui existe et est animé d'une énergie vitale est là pour une bonne raison, ce n'est pas à moi, ni à toi à en décider la nature.
Je n'ai plus de véhicule personnel, donc je me déplace grâce aux transports en commun. Ce qui me plait c'est cette proximité des gens. Quand je circulais dans mon véhicule personnel j'étais coupée des autres. J'avais des réactions très égoïstes, je me sentais maîtresse de mon petit univers et, séparée des autres dans mon abri de fortune, je me permettais des libertés, dont celle d'ignorer ceux qui sont dehors, dans leur véhicule, ou sur le bord de la route.
Je ne vous dirais pas tout ce que nous faisons tous au volant, car même en respectant le code de la route, nous développons une forme d'individualisme de circonstance quand nous voyageons dans notre voiture.
Je disais donc que j'aime les transports en commun. En effet je suis passionnée par l'observation du monde et des autres. Pour observer en toute quiétude il faut avoir l'esprit libre de toute autre action. Et quand je pratique cette discipline, mon esprit s'éveille et une foule d'idées me viennent, dernièrement j'ai réfléchi à ce qui nous sépare les uns des autres. J'ai pensé à la peau...cela peut paraître incongru et pourtant ...Nous sommes des êtres multiples, sans rentrer dans des considérations spiritualistes, je peux déjà identifier que je suis une personne qui évolue dans différents lieux ( maison, Nature, rue, commerces...), dans différentes situations (vie active, oisiveté, retraite, associations...), et dans différentes catégories de classes ( âge, position sociale, croyances...). Puis-je certifier que je me comporte toujours à l'identique quels que soient les endroits, les situations où les personnes que je fréquente ? Je pourrais prétendre qu'en fonction de mon choix d'être toujours dans l'authenticité, je me dois d'être toujours égale à moi même et donc adopter une même règle de conduite en toutes circonstances. Bien évidemment que non, à moins d'avoir atteint une forme de sagesse qui me confère une telle maîtrise de moi que je parvienne à opposer une même attitude en permanence...et cela sans compter sur le facteur émotionnel, l'état de forme ou de fatigue physique, le niveau d'enlisement de l'esprit dans le souci du quotidien, ...en fait il existe autant de "moi" que de situations extérieures le demandent.
La personne humaine est faite de tout cela. Elle subit toutes ces influences, sans compter toute les manipulations exercées par le monde politique, économique et social.
Quand nous voyons un autre individu, que voyons nous? Une personne humaine dont la seule connaissance que nous avons est son apparence physique, délimitée par ce qui nous sépare d'elle : sa peau.
Lorsque je suis dans l'autobus, je vois des gens, je ne sais rien d'eux. Je ne peux imaginer ce qu'il sont ou ce qu'ils vivent , qu'à travers le prisme de mes connaissances, de ma pensée, par déduction de ce que je détecte en fonction de ce que je vois.
Sachant ce que je sais de ma propre personne, et que les gens ignorent, je peux imaginer quelle complexité renferme chaque individu, et souvent, les autres ne savent pas à quel point il est possible et fort probable de se tromper.
Sous la peau, nous sommes pratiquement tous globalement semblables, à part tout ce qui découle plus intimement du domaine génétique, qui nous différencie à plusieurs autres niveaux, nous avons les mêmes organes et la même physiologie humaine. Mais une fois recouverts de cette peau, tout change. Notre différence physique est plus visible, et elle traduit aux yeux des autres ce que la génétique dit dans l'intimité des cellules.
La peau est donc bien pour moi la première des séparations. La première individuation physique lisible.
Je ne cherche pas à définir quelque "science" de la connaissance...c'est juste le reflet de ma pensée.
Quand je suis dans le bus ici, ou dans le tram, ou le métro à l'étranger, je regarde les gens, sans les dévisager, je les observe simplement, collectivement et individuellement. À chaque fois je suis devant un vrai mystère, plus grand encore que tous ces romans policiers que j'affectionne.
Qui sont tous ces êtres? Comment sont leurs vies, leurs envies, leurs rêves, leurs secrets intimes, leurs drames, leurs espérances, la source de leurs joies?
Mon esprit refuse toute les "évidences". Même si les critères communs sont la famille, le travail, la vie sociale, l'argent, ou l'absence de tout ça, il existe autre chose, c'est la façon que chacun a d'y faire face. Les ressorts que chacun trouve en sa personne pour répondre à des situations qui pourraient au prime abord s'avérer comme similaires.
Parmi toutes ces vies que je croise, certaines ont vécu des drames inimaginables pour moi, d'autres connaissent un bonheur de vivre qu'ils n'affichent pas, d'autres encore vivent une existence d'une platitude parfaite, et pourtant, dans le silence de ces corps assis, ou debout il y a une histoire qui ne se dit pas.
Je n'en tire pas de conclusion, j'observe et j'accepte cet état de choses.
Tout cela pour en revenir à cette liberté que chacun de nous possède en lui.
Ce mystère des autres est la forme fondamentale de la liberté. La première qui donne un sens à notre existence : quand nous commençons à vouloir imaginer, pour la comprendre, la vie des autres, nous sommes en position de faiblesse, nous créons notre propre enfermement , car nous mettons des limites à l'existence des autres. Quand nous enfermons les autres dans nos schémas de pensée, nous les conditionnons à notre mémoire, nos souvenirs, nos expériences, et, par cette action, nous mettons des limites aux champs multiples des possibles.
Si nous voulons exister à l'infini, nous devons accepter l'infini des possibilités. Donner libre cours à l'infini et, c'est laisser un champ que nous ne pouvons fermer car nous ne pouvons l'atteindre. La liberté de l'esprit réside dans l'infini, c'est à dire au delà de l'imaginable.
Si je prends la posture "spiritualiste", je considère que chaque être vivant n'est pas limité à son enveloppe physique, qu'il est pure énergie. Donc quand je suis assise dans ce bus, je vois des personnes physiques, dont je sais que l'apparence n'est que la traduction de leur état mental, de ce qu'ils ont matérialisé dans cette vie, dans un but d'évolution spirituelle, qui les mènera vers leur être profond, en cohésion avec l'Univers.
Je sais alors qu'ils disposent de plusieurs niveaux de conscience dont le plus bas est matérialisé. Et qu'ils le sachent ou pas, c'est dans chacun de leurs actes, dans chacune des décisions de leur vie, qu'ils se révéleront peu à peu à eux mêmes et qu'ils réaliseront leur destin. Leur chemin est leur choix.
Donc dans cette analyse, il apparaît que quoique je pense, dise ou fasse, cela n'aura aucune incidence ni aucune signification car la destinée est personnelle. Donc même dans cette vision du monde, la seule attitude est celle de respecter le chemin de chacun et les façons de l'emprunter. Et toute l'aide que je pourrais apporter, serait d'observer sans jamais prendre parti ni interférer dans la vie d'autrui.
Faire preuve de compassion envers le monde, rejoint cette notion de liberté.
Être libre c'est laisser aller le monde, lui faire confiance, et avoir cette posture sacrée, débarrassée de tout conflit intérieur. Et c'est cela l'infini des possibles...
28/04/2017
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