La vie de Liszt est un roman

 

La vie de Liszt est un roman

- de Zsolt Hasanyi, Editions Actes Sud

L'ouvrage de Zsolt Harsanyi est inspiré par la grande admiration qu'il porte à cet artiste : pianiste et compositeur de grande envergure qu'est Franz Liszt. Il faut avouer que l'artiste est immense et sa vie un vrai roman. L'époque, le XIXème siècle est riche tant du point de vue artistique et littéraire, que philosophique et politique. Un esprit aussi fin et sensible que celui de Franz Liszt ne pouvait que créer, souffrir et vivre dans la passion. Poutant c'est un être raisonné entouré d'une famille qui l'a élevé durement et dans l'amour de l'effort. Mais les paillettes du succès et l'adulation des gens de son époque lui feront souvent "brûler" la tête, et le conduiront à vivre des moments de réclusion solitaire.

Liszt est touchant, émouvant, il tombe dans la ferveur travailleuse, la ferveur amoureuse, puis dans la ferveur religieuse. Il veut tout comprendre, tout savoir, tout maîtriser, c'est un curieux boulimique de tout. Surtout de ce qui est inaccessible, des secrets, des mystères.

Extrait :

"C'est par un travail inhumain qu'il lui fallut conquérir le mystérieux piano qui se tenait là avec ses dents ricanantes, s'étalant immoble sur ses trois pieds, de l'air de dire : "voyons un peu comment tu sauras me tirer mes secrets." Et Franci se jeta sur ces secrets avec une folle détermination qui frisait l'obsession du malade mental. Il lui arriva une fois de travailler d'une seule traite pendant vingt huit heures, un jour entier et encore quatre heures.

Il donnait des leçons pour vivre et parfois, lorsque ses doigts ne supportaient plus les efforts violents et cruels, il lisait pour se reposer. Tout, à tort et à travers. De nouveau il avait cessé de fréquenter la société, il rencontrait à peine ses amis. Balzac lui aussi était très occupé. Victor Hugo travaillait à un grand roman qui avait pour cadre l'Eglise Notre Dame. Berlioz n'était pas à Paris, Musset courait constamment le jupon. Et lui il restait assis pendant des heures interminables au piano et luttait avec lui comme avec un démon. Ce fut un combat effroyable."

 

Le roman de Zsolt Harsanyi est d'une richesse incroyable : l'auteur traite de la musique en connaisseur, il est librettiste, la musicologie lui est donc parfaitement familière. Il nous emmène à travers toute l'Europe et nous fait vivre les soubresauts de l'époque. Le monde de la ferveur religieuse demeure en toile de fond, Liszt a été élevé dans la foi par une mère protectrice et aimante. Mais L'esprit critique est toujours présent car Franz Liszt, "Franci", ne se laisse pas aisément convaincre, mais il a une foi profonde et lucide.

Extrait

"Le catholicisme n'avait jamais cessé d'être pour lui une question de la même importance que la musique. Il avait de nombreux contacts avec des gens d'Eglise, correspondait avec l'abbé Lamennais, et lorsque le parlement vota une loi qui prescrivait que, dorénavant, l'enseignement de la musique serait obligatoire dans les écoles élémentaires, il se mit à rédiger un petit rapport sur l'importance à accorder à la musique sacrée. Il envoya l'article à La Gazette musicale mais celle-ci ne le fit pas paraître. Le rédacteur sourit poliment en lui disant :

- Je suis désolé, Monsieur Liszt, votre nom parmi les rédacteurs de mon journal déchaînerait la censure. Vous êtes trop lié aux romantiques, et ceux-ci sont mal vus officiellement."

 

Et nous suivons l'actualité des autres artistes de son époque nous suivons l'actualité de ses contemporains et amis ; Berlioz, Dumas, Ernst, Hugo, Musset. Nous assistons à un concert de Paganini, décrit sous formes de métaphores empreintes d'émotions, ce concert va époustoufler et tétaniser le musicien:

Extrait

" Oppressé, tout près de l'évanouissement, Fanci se leva de son siège lorsque résonnèrent les variations des mélodie "Mose in Egitto" de Rossini. Il était accablé, humilié, enflammé et indigné à la fois. On comprenait la croyance selon laquelle cet homme avait fait de l'intestin de sa bien-aimée défunte la corde de sol et avait reçu son savoir du diable en personne, car il possédait non seulement un talent démoniaque, mais aussi une férocité infernale et grimaçante, la jouissance sauvage de la joie maligne, le sacrilège ricanant de l'imitation ignoblement merveilleuse des cris d'animaux et de la fanfare militaire.  Devant cet homme on pouvait aussi bien se prosterner qu'être pris d'un désir furieux de l'etrangler de ses mains nues."

 

Puis la vie amoureuse et intime Frantz Liszt, ses enfants, la mort de son fils Daniel , le mariage de Cosima avec Wagner, et toutes les luttes pour faire reconnaître ses amours...Jusqu'à la fin de sa vie.

Cet ouvrage est prenant, intéressant et enrichissant,

Bonne lecture !!

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